Référence bibliographique [3683]
Julien, Mélanie. 2005. «La scolarisation différentielle en milieu urbain en voie d’industrialisation : le cas de la ville de Québec au tournant du XXe siècle». Mémoire de maîtrise, Québec, Université Laval, Département de sociologie.
Fiche synthèse
1. Objectifs
Intentions :
« Nous avons donc voulu combler partiellement ce manque de connaissances sur la fréquentation scolaire au Québec au XIXe siècle. D’un point de vue sociologique, l’étude de la fréquentation scolaire pour l’époque qui précède l’instruction obligatoire ouvre sur deux voies; la première centrale (la scolarisation différentielle), l’autre secondaire (l’impact de l’industrialisation). D’une part, nous devons traiter de la scolarisation différentielle de manière à évaluer l’emprise qu’avaient, respectivement, l’appartenance culturelle, la situation économique et la classe sociale sur la fréquentation scolaire. D’autre part, nous ne pouvons étudier la scolarisation différentielle au XIXe siècle en faisant fi des forces de l’expansion de l’instruction. De fait, il importe d’interroger au passage l’impact de l’industrialisation sur la fréquentation scolaire. Dès lors, notre questionnement se pose précisément sur les ordres de fait qui ont influencé la fréquentation scolaire des enfants du Québec au XIXe siècle. Par ordre de fait, nous entendons à la fois les transformations de la structure de l’emploi (survenues progressivement avec l’industrialisation), l’appartenance culturelle (la religion, la langue, le groupe ethnique), les conditions purement économiques et la position sociale. En d’autres termes, notre recherche consiste à examiner comment se combinent les effets respectifs de chacun de ces éléments sur la fréquentation scolaire. » (pp. 5-6)
Questions/Hypothèses :
« En résumé, nous formulons six hypothèses de travail auxquelles notre analyse des données tâchera de répondre.
- Hypothèse 1 : l’effet négatif de l’industrialisation à la fin du XIXe siècle sur les taux de fréquentation scolaire des garçons;
- Hypothèse 2 : la scolarisation différentielle entre garçons et filles à l’avantage des premiers, et ce, autant en 1871 qu’en 1901;
- Hypothèse 3 : la propension plus grande des familles nombreuses à retirer leurs enfants de l’école pour les mettre au travail;
- Hypothèse 4 : la fréquentation scolaire moins répandue chez les enfants, dont la famille bénéficie de plusieurs revenus, signe qu’elle fait face à des difficultés économiques;
- Hypothèse 5 : la scolarisation moins répandue chez les Canadiens français que toute autre communauté culturelle;
- Hypothèse 6 : l’effet de la reproduction sociale : la scolarisation plus répandue chez les enfants dont le chef de famille exerce un emploi qualifié et ceux dont la famille engage un domestique. » (p. 81)
« La formulation d’une dernière hypothèse s’impose. À l’instar de Katz et Davey, nous soumettons l’hypothèse que le modèle de la reproduction sociale aura plus de prégnance que les modèles socio-économique et culturel pour expliquer les variations observables dans les taux de fréquentation scolaire. Ainsi, une fois contrôlées toutes les variables prises en compte, l’effet de la classe sociale sera plus significatif, présumons-nous, que l’appartenance culturelle et les conditions socioéconomiques. » (p. 82)
2. Méthode
Échantillon/Matériau :
« Les deux principales sources de données disponibles pour mesurer la fréquentation scolaire à l’époque sont les recensements fédéraux, conduits à chaque décennie, et les Rapports du surintendant de l’instruction publique (RSIP), publiés annuellement. » (p. 82)
« Retiendrons notre attention dans le cadre de cette étude, les recensements de 1871 et de 1901. Les compilations de chacun de ces recensements ont été publiées dans quatre volumes (celles de 1871 entre 1873 et 1876 et celles de 1901 entre 1902 et 1906). Quatre-vingt-douze ans après la collecte (soit en 1963 pour les données de 1871 et en 1993 pour celles de 1901), les données reproduites sur microfilm ont été accessibles, et ce, en conformité avec la loi sur la protection des renseignements personnels (Canada, 1995:3). Ces données ont récemment été saisies sur support informatique dans le cadre du programme de recherche ’Population et histoire sociale de la ville de Québec’ (PHSVQ) du Centre interuniversitaire d’études québécoises (CIEQ-Université Laval). Les chercheurs responsables de ce projet, Messieurs Richard Marcoux et Marc Saint-Hilaire, ont généreusement accepté que nous mettions ces données au profit de notre étude. » (p. 84)
Instruments :
« Le recensement de 1871 comportait 211 questions réparties en 9 tableaux : les vivants, les morts, les établissements, les terres cultivées et leurs produits, le bétail et les produits animaux, les établissements industriels, les produits des forêts, les navigations et pêcheries ainsi que les produits des mines. Plus dense que les précédents, le recensement de 1901 comprenait 561 questions regroupées en 11 tableaux. Outre les changements de vocables, ce sont deux nouveaux tableaux qui s’ajoutent à ceux de 1871 : les produits des champs et les valeurs agricoles. Parce qu’il contient les caractéristiques sociodémographiques de la population, seul le tableau sur les vivants nous intéresse. Celui-ci comportait 23 questions en 1871 et 34 en 1901. » (p. 87)
Type de traitement des données :
Analyse statistique
3. Résumé
« Dans l’historiographie québécoise, la faible instruction des Canadiens français est généralement expliquée par leur culture marquée par la non-valorisation de l’école. D’autres interprétations émanent cependant de la littérature : la concentration des Canadiens français dans la classe laborieuse et la structure de l’emploi au Québec sont parfois mises en cause.
Cherchant à départager l’effet respectif de la classe sociale, des conditions socio-économiques et de l’appartenance culturelle sur la scolarisation des enfants, notre recherche s’intéresse à la fréquentation scolaire dans la ville de Québec en 1871 et en 1901. À partir des données censitaires, nous utilisons l’analyse de régression multiple afin de cibler les variables les plus déterminantes de la fréquentation scolaire. Si, à classe sociale égale, les Français catholiques sont moins scolarisés que les Irlandais catholiques et les protestants de Québec, la fréquentation scolaire paraît relever davantage de la classe sociale que de l’appartenance culturelle ou de la situation socio-économique. » (p. 1)