Référence bibliographique [4855]
Étienne, Loméga. 2003. «Comparaison du profil psychosocial d’adolescents agresseurs sexuels ayant subi ou non une agression sexuelle pendant l’enfance». Mémoire de maîtrise, Gatineau (Québec), Université du Québec en Outaouais, Département de psychoéducation.
Fiche synthèse
1. Objectifs
Intentions :
« L’étude transversale qui suit se veut être à la fois une étude descriptive et comparative. Le premier objectif vise à décrire un échantillon d’AAS [Adolescents Agresseurs Sexuels] alors que le second objectif vise à comparer les AAS selon qu’ils rapportent ou non une ASE [Agression Sexuelle pendant l’Enfance]. Plus spécifiquement, le premier objectif vise à dresser le portrait des AAS de l’échantillon à partir des diverses caractéristiques sociodémographiques, familiales, cliniques ainsi que la proportion d’entre eux ayant obtenu un score aux tests psychométriques pouvant être associé à des symptômes cliniques. Le second objectif vise à comparer le profil psychosocial de deux groupes d’AAS selon qu’ils rapportent ou non une victimisation sexuelle pendant l’enfance sur ces mêmes variables. » (p. 29)
Questions/Hypothèses :
« L’hypothèse principale de l’étude stipule que comparativement aux AAS qui ne rapportent aucune ASE ceux qui ont vécu des sévices sexuels pendant l’enfance présentent un profil psychosocial plus instable et perturbé. En effet, à partir des données recueillies avant le début du traitement, on s’attend à ce que les AAS qui ont été victime [sic] d’ASE se différencient, à la hausse (i.e. davantage de déficits), sur toutes les variables sociodémographiques, familiales et cliniques. Plus spécifiquement, les adolescents qui ont subi des sévices sexuels dans l’enfance présenteront davantage des symptômes de stress post-traumatiques, une compréhension plus lacunaire des gestes sexuels posés, des déficits au niveau des habiletés sociales et hétérosociales, un niveau plus élevé de solitude et d’isolement, un niveau plus élevé d’inconforts en ce qui concerne la sexualité, un nombre plus élevé de stratégies mal adaptées en périodes de stress intense et enfin des attitudes plus déficitaires par rapport à la sexualité. Nous croyons également qu’ils seront significativement plus nombreux à obtenir un score pouvant être associé à des symptômes cliniques au niveau des instruments psychométriques qui ont été administrés, justifiant par le fait même, des interventions cliniques distinctes des AAS qui n’ont pas été sexuellement victimisés dans l’enfance. » (pp. 29-30)
2. Méthode
Échantillon/Matériau :
« Entre février 1999 et décembre 2001, 129 AAS de sexe masculin ont été rencontrés avant le début de leur traitement par différents assistants de recherche qualifiés ayant une formation académique universitaire. Les AAS ont été recrutés dans quatre sites de traitement au Québec dont notamment trois Centres jeunesse (Lanaudière, Mauricie Bois-Francs, Montérégie) et un organisme communautaire de l’Outaouais (Centre d’Intervention en Abus Sexuels pour la Famille, CIASF). Les critères de sélection étaient les suivants : 1) être un adolescent de sexe masculin; 2) être âgé de 12 à 18 ans; et 3) ne pas être atteint d’une psychopathologie grave (par exemple, un diagnostic de psychose, un retard mental ou schizophrénie). L’âge des participants variait de 12 à 17 ans (M = 14,26 ans; ÉT = 1.68). » (p. 32)
Instruments :
- guide d’entretien;
- le Trauma Symptom Checklist for Children (TSC-C: Brière, 1989);
- le Questionnaire de compréhension des gestes (QCG : Perron, Lagueux & Wright, 1999);
- le Matson Evaluation of Social Skills in Youngters (MESSY, Matson, Esdveldt-Dawson & Kazdin, 1983);
- le UCLA Lonelines scale-version 3 (Russell, 1996);
- le Coping Inventory for Stessful Situations (CISS: Endler & Parker, 1990);
- le Survey of Heterosexual Interactions (SHI: Twentyman & McFall, 1975);
- le Dating Questionnaire (Kirby, 1990);
- le Sex Knowledge and Attitude Test for Adolescent (SKAT-A: Lief, Fullard & Devlin, 1990).
Type de traitement des données :
Analyse statistique et analyse de contenu
3. Résumé
« Les Adolescents Agresseurs Sexuels (AAS) représentent une forte proportion des délinquants sexuels. Dans une recension des écrits sur le sujet, Lagueux et Tourigny (1999) démontrent qu’au Québec, lorsque l’âge de l’agresseur est connu, les études rapportent que de 20 % à 30 % des agressions sexuelles commises envers les enfants sont commises par des adolescents. L’un des facteurs étiologiques fréquemment discuté dans la documentation scientifique, est la présence de mauvais traitements en bas âge, dont notamment une Agression Sexuelle pendant l’Enfance (ci-après ASE). Certains auteurs soulignent que les AAS qui ont vécu des sévices sexuels dans l’enfance présentent un profil psychosocial différent des AAS qui n’ont pas été sexuellement victimisés dans l’enfance (Becker et al., 1991; Cooper et al., 1996; Hummel et al., 2000). Dans un premier temps, ce mémoire de maîtrise vise à dresser le portrait d’un échantillon d’AAS québécois à travers leurs caractéristiques spécifiques. Un second objectif de cette étude consiste à comparer le profil psychosocial des AAS qui rapportent ou non une histoire d’ASE afin d’en dégager les différences ainsi que les caractéristiques communes aux deux groupes. Les hypothèses proposées stipulent que contrairement au groupe des AAS qui ne rapportent aucune ASE, ceux qui ont vécu des sévices sexuels dans l’enfance présenteront davantage : 1) des carences dans diverses sphères de leurs vies; 2) des symptômes de stress post-traumatiques; 3) une compréhension lacunaire au niveau des gestes sexuels posés; 4) des déficits au niveau des habiletés sociales; 5) des déficits au niveau des habiletés hétérosociales; 6) de solitude et d’isolement; 7) d’inconforts en ce qui concerne la sexualité; 8) de stratégies mal adaptées en périodes de stress intense; 9) de déficits quant aux attitudes par rapport à la sexualité et enfin, 10) un tableau clinique symptomatique. Au total, 124 AAS de 12 à 17 ans provenant de différentes régions du Québec ont été rencontrés au début de leur traitement. Diverses informations ont été recueillies à l’aide d’une entrevue clinique semi-structurée et l’administration de tests psychométriques standardisés. Les AAS de l’échantillon total : 1) rapportent des difficultés au niveau de certaines sphères de leur vie dont notamment en ce qui concerne l’aspect familial; 2) présentent à certains égards des symptômes nécessitant une intervention clinique; 3) ont commis dans une plus grande proportion des gestes d’attouchements et de pénétration avec les doigts; 4) ont agressé dans une plus grande proportion une fille; 5) ont agressé principalement une victime âgée de moins de 8 ans; et 6) ont agressé une victime ayant un lien de parenté avec eux. La comparaison des AAS en fonction de la présence ou non d’une ASE met en évidence certaines différences significatives. En effet, ceux qui ont vécu des sévices sexuels au cours de l’enfance rapportent davantage : 1) de l’instabilité au niveau familial; 2) des caractéristiques cliniques problématiques; 3) des symptômes de stress post-traumatique; 4) des habiletés sociales déficitaires; 5) des stratégies d’adaptation inadéquates en période de stress intense, et enfin 6) des symptômes nécessitant une intervention clinique. Les résultats sont discutés en fonction de ce qui est rapporté dans la documentation scientifique et quelques avenues d’intervention cliniques sont proposées. La présente recherche a permis de confirmer certains postulats de la documentation scientifique dont notamment, le fait que certains AAS proviennent de milieux familiaux instables et qu’ils présentent un profil psychosocial reflétant plusieurs difficultés. De plus, l’analyse des résultats selon la présence d’une ASE ou non confirme également à certains égards, l’état des connaissances actuelles. » (pp. ii-iii)