Revenir sur les silences. Les violences sexuelles familiales (Québec, 1950-1980) et leur jugement des décennies après les faits

Revenir sur les silences. Les violences sexuelles familiales (Québec, 1950-1980) et leur jugement des décennies après les faits

Revenir sur les silences. Les violences sexuelles familiales (Québec, 1950-1980) et leur jugement des décennies après les faits

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Référence bibliographique [22550]

Bérard, Jean et Sallée, Nicolas. 2020. «Revenir sur les silences. Les violences sexuelles familiales (Québec, 1950-1980) et leur jugement des décennies après les faits ». Genèses, vol. 3, no 120, p. 91-111.

Fiche synthèse

1. Objectifs


Intentions :
Cet article vise à analyser les procès concernant les violences sexuelles familiales qui ont eu lieu entre les années 1950-1980 au Québec. Plus particulièrement, les «procès issus [de] plaintes, relevant d’un type d’affaire que des experts, juristes ou psychologues, nomment historical child sexual absuse, constituent la matière première cet article.» (p. 92)

2. Méthode


Échantillon/Matériau :
Les auteurs ont utilisé la base de données Société québécoise d’information juridique (SOQUI). Ils ont «compilé, parmi l’ensemble des décisions conservées entre 2001 et 2017, celles qui comprennent le mot-clef “grossière indécence”, soit les termes d’une infraction à caractère sexuel abolie en 1988 […]. Sur les 261 décisions produites, [ils ont] d’abord sélectionné les 88 affaires relatives à des violences sexuelles sur enfants. [Ils ont] ensuite encore réduit [leur] corpus à 65 dossiers, pour ne retenir que les violences sexuelles familiales […].» (p. 92)

Type de traitement des données :
Réflexion critique

3. Résumé


«Les procès pour des crimes sexuels du passé lointain permettent de saisir une partie des enjeux structurels liés à la production du silence, à la circulation de la parole et à la réception de cette parole. Le silence sur l’inceste peut en première analyse être perçu comme la conséquence de la nature extraordinaire de l’interdit que cet acte brise. Il y aurait en ce sens de l’indicible en ce que la prohibition de l’inceste ne serait pas seulement une infraction mais un interdit anthropologique fondamental de toutes les sociétés humaines. […] Mais en pratique, les recherches sociologiques ou anthropologiques, comme les procès que nous étudions, montrent qu’il faut plutôt analyser l’inceste, dans ce qu’il a d’“ordinaire” […], comme un produit de la domination patriarcale dans l’espace domestique […]. En explorant les limites du droit, à la fois dans l’usage d’incriminations abolies et dans les critères de preuve élaborés pour ces affaires, la justice canadienne a rendu possible l’écoute d’une parole sur les violences subies durant l’enfance. Il faut cependant être prudent pour nommer cette transformation, parfois décrite comme une libération de la parole. D’une part, une parole a toujours existé, même si elle ne trouvait pas de relais. D’autre part, cette parole libérée est une parole à distance, n’empêchant pas qu’au moment où les faits se déroulent, et aujourd’hui encore, les violences sexuelles familiales demeurent largement tues, peu et tardivement sujettes à des poursuites judiciaires.» (p. 107-108)