1. Objectifs

Intentions :
Dans cet article, l’autrice questionne «la réception des œuvres d’autrices qui abordent l’amour, en se demandant si les effets de genre littéraires et sexués interviennent dans le traitement du discours amoureux de ces femmes. [À] la lumière des travaux sur le genre et la légitimité culturelle[,] cet article convie à une réflexion sur les écrivaines qui ont “opéré une transgression de l’habitus sentimental” dans leurs œuvres […].» (p. 410) Ce sont plus particulièrement les œuvres Avec ou sans amour de Claire Martin et Folle de Nelly Arcan qui sont examinées.

Questions/Hypothèses :
L’autrice émet «l’idée que la vision canonique de l’amour et du sujet féminin, dont les traits incarnent la vision du système patriarcal et hétérosexuel, supplantera le discours novateur des autrices dans les articles de presse. [Elle avance] également que la lecture de la réception critique du discours amoureux mettra au jour une stigmatisation des genres littéraires et sexués propres à la production littéraire étudiée, ce qui aura comme effet de minoriser le statut des deux œuvres au sein du champ littéraire.» (p. 412)

2. Méthode

Échantillon/Matériau :
«Tenant compte à la fois des luttes au sein du champ littéraire que convoque [le corpus de l’autrice], du contexte sociohistorique qui accompagne la publication des deux œuvres choisies ainsi que des instances de production, de diffusion et de consécration qui influencent la réception critique, [cet] article interrogera séparément les articles de presse qui ont accompagné la réception d’Avec ou sans amour et de Folle en regard du discours amoureux véhiculé dans ces deux œuvres.» (p. 411)

Type de traitement des données :
Analyse de contenu
Réflexion critique

3. Résumé

«Au terme de [l’]analyse de la réception de ces deux œuvres, [il] apparaît clair que la liberté de penser, de (se) dire et de dénoncer l’amour sous ses formes les plus perverses permet un éclairage nouveau sur le traitement du sentiment amoureux dans la production littéraire féminine. Ensemble, Martin et Arcan transgressent le discours archétypal qui associe femmes et sentimentalité et bousculent l’ordre patriarcal. Partie prenante de la presse, la réception critique se présente comme un espace privilégié pour l’élaboration d’un discours amoureux normatif. À l’instar des chroniqueurs.ses qui signent des articles qui traitent de la manière de se comporter en amour ou qui répondent aux courriers du cœur, les critiques qui abordent le discours amoureux possèdent un capital symbolique qui leur confère une légitimité certaine. Si les protagonistes du corpus étudié arrivent à transformer le rapport de pouvoir par le biais de diverses stratégies discursives, la réception critique qui fait état de ce corpus ne cible pas le caractère revendicateur et novateur des œuvres. Au contraire, les articles de presse insistent sur les impacts des transgressions effectuées par les femmes, se permettant de poser un jugement littéraire – et souvent moral – tout en laissant de côté le réel discours des narratrices. Autrement dit, la parole des écrivaines jugée plaintive, jalouse et apitoyée est étouffée par les constats qui assignent les protagonistes à un rôle hétéronormatif.» (p. 422)